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Les paradis fiscaux

                   Paradis fiscaux :

les petits secrets des grandes entreprises

                      / intégrale

Texte provenant de Wikipédia

 

Un paradis fiscal est un pays ou territoire à fiscalité réduite ou nulle, c'est-à-dire où le taux d'imposition est jugé très bas en comparaison avec les niveaux d'imposition existant dans les pays de l'OCDE. Cette notion nécessite une « indulgence du législateur » du pays concerné et s'oppose à celle d'harmonisation fiscale. Ces paradis sont réputés pour encourager l'évasion fiscale, des règles laxistes ou le contournement des règles et contribuer à l'augmentation des inégalités dans le monde (Roger Brunet les qualifie en 1986 d'« antimonde » pour montrer que tout y fonctionne « à l'inverse des règles respectées ailleurs » et qu'ils peuvent aller contre les intérêts du reste du monde).

L'opacité des systèmes fiscaux et financiers est un critère important, parfois sous-estimé, même si on peut distinguer paradis fiscal et paradis financiers.

Trois types de paradis fiscaux peuvent être distingués :

  1. les paradis fiscaux à faible imposition sur les personnes physiques ;

  2. les paradis fiscaux à faible imposition sur les entreprises ;

  3. les paradis fiscaux à faible imposition sur les personnes physiques et les entreprises.

Par exemple la principauté de Monaco est un paradis fiscal pour les personnes physiques étrangères qui y résident (à l'exception notable des Français) mais le taux de l'impôt sur les sociétés est de 33,33 % comme en France.

Le terme de paradis fiscal, au sens strict de fiscalité faible, ne prend son sens qu'en comparaison avec d'autres pays (ou d'autres régions du même pays) à fiscalité plus élevée au moins dans certains domaines ou pour certaines activités. Ainsi un rapport de l’OCDE de 1987 relatif à la fiscalité internationale précisait, dès son introduction, qu’ « il n’existe pas de critère unique, clair et objectif permettant d’identifier un pays comme étant un paradis fiscal ».

Pour certains, toute tentative de définir précisément les paradis fiscaux est vouée à l’échec. En réalité, il y aurait autant de définitions qu’il y a de « paradis fiscaux ». Aussi, selon Karim Berthet et François Stifani, l'ambiguïté qui caractérise la notion de paradis fiscal rend celle-ci difficilement appréhendable. Divisés, les dispositifs nationaux affaiblissent selon eux la coopération fiscale unitaire entre États.

En anglais, l'expression correspondante est « tax haven », « refuge fiscal » ; en allemand on emploie les termes de « Steueroase » ou de « Steuerparadies », « oasis fiscale » ou « paradis fiscal ». Les notions de paradis fiscal et de paradis financier se recouvrent en partie. L'opacité financière dans un pays permet de dissimuler des activités ayant lieu dans les paradis fiscaux.

Dans la plupart des pays membres de l’OCDE, il n’existe pas, dans la législation ou dans la jurisprudence, de définition précise de la notion de paradis fiscal.

Dans le précis de fiscalité établi annuellement par la direction générale des Impôts française, le terme paradis fiscal n’est utilisé qu’une fois et dans une instruction du ministère des Finances du 18 mai 1973. Le paradis fiscal y est défini comme un pays « qui applique un régime fiscal dérogatoire tel qu’il conduit à un niveau d’imposition anormalement bas », sans qu'il soit précisé ce qu'est un niveau d'imposition anormalement bas. Dans le code général des impôts français, l’article 238A préfère parler de « pays à régime fiscal privilégié », et paradis fiscal n’apparaît pas dans l’index alphabétique. Cet euphémisme, qui remonte à l’article 14 de la loi de finances de 1974, désigne les États ou territoires où les contribuables sont imposables ou assujettis à des impôts sur les bénéfices ou les revenus notablement moins élevés qu'en France, ce qui montre le côté relatif de cette définition en France;

Pour qu’un État ou territoire figure sur la liste française des ETNC (État ou Territoire Non Coopératif) – qualifiée parfois « d’écran de fumée » par certains praticiens-, il y a trois conditions cumulatives : être « non membre de l’Union européenne au 1er janvier 2010 » ; avoir « fait l’objet d’un examen par l’Organisation de coopération et de développement économiques » (OCDE) et ne pas avoir « conclu avec la France » « ni signé avec au moins douze États ou territoires » une convention d’assistance administrative d’échange réciproque d’informations fiscales. 

La Suisse est un paradis bancaire, mais n'est en général pas considérée comme un paradis fiscal; le Royaume-Uni ou les États-Unis ne sont pas non plus considérés comme un paradis fiscal, bien que, en pratique, ils puissent offrir les mêmes avantages aux particuliers (statut de résident non domicilié au Royaume-Uni) comme aux entreprises (sociétés non résidentes aux États-Unis). La France n'est pas considérée comme un paradis fiscal mais, dans certains secteurs géographiques, les zones franches permettent aux entreprises de réduire de façon drastique leur imposition : ainsi la Polynésie française connaît un régime d'imposition sur les personnes physiques extrêmement bas, tandis que les TAAF bénéficient d'un pavillon de complaisance. Ces exemples, qui ne sont pas exhaustifs, nous indiquent que les régimes dérogatoires existent en tous lieux et que les États qui dénoncent les paradis fiscaux ne sont pas en la matière d'une pureté immaculée.

L'histoire des paradis fiscaux est parallèle à celle de la fiscalité.

Ainsi, depuis le IIe millénaire av. J.-C., les premiers commerçants de la Grèce antique envoyaient déjà des émissaires dans certains ports afin que vendeurs et acheteurs, lors d'une transaction, se retrouvent à un point convenu pour transporter la marchandise et échapper ainsi aux taxes portuaires déjà existantes (on parlerait aujourd'hui d'opérations offshore).

Les paradis fiscaux se développent parallèlement aux États, à partir du xviie siècle, et se multiplient avec l'expansion du commerce et l’intensification des échanges de capitaux, lors de la première mondialisation. Par exemple, des avocats d'affaires new-yorkais convainquent les gouverneurs de petits États américains qui ont des problèmes budgétaires (le New Jersey dans les années 1880, le Delaware en 1898) de fournir un droit de franchise aux firmes qui y domicilient leur siège social. Mais c'est durant les années 1920 (augmentation des prélèvements fiscaux à la suite de la crise de 1929), les 1930 (les juges britanniques ayant décidé en 1929 que le fisc s'appliquait aux entreprises multinationales dont la décision stratégique se prend à Londres, les firmes y échappent en inventant la « résidence fictive », plaçant le conseil d'administration dans un autre pays ; vote en 1934 de la loi du secret bancaire en Suisse, laquelle permet de créer des comptes masqués) et, surtout, pendant les Trente Glorieuses (contournement de l'État-providence, développement de la City grâce à la chasse aux eurodollars encouragée en 1957, lorsqu'il prend la tête de la Bank of London and South America, par Sir George Bolton, ancien dirigeant de la Banque d’Angleterre) que les paradis fiscaux vont prendre leur véritable essor.

Depuis le début des années 1980, le mouvement ne s’est pas ralenti. Un rapport de l’OCDE d’avril 1998 précise ainsi que « l’investissement direct étranger des pays du G7 dans un certain nombre de pays des Caraïbes et d’États insulaires d’Asie généralement considérés comme des pays à fiscalité peu élevée, a plus que quintuplé entre 1985 et 1994 pour s’établir à quelque 200 milliards de dollars, ce qui représente un accroissement bien supérieur à la croissance de l’encours actuel de l’investissement direct étranger ».

Au premier trimestre 2004, le ministère du Commerce chinois s’inquiétait que 20 % des investissements directs étrangers en Chine provenaient des îles Vierges, des îles Caïmans et des Samoa. De manière globale, en 1997, le montant des actifs gérés par 65 paradis fiscaux s’élèverait à la somme de 4 497 milliards d’euros, selon les journalistes du journal L'Expansion. Trois ans plus tard, le quotidien français Libération publiait une enquête évaluant l’ensemble des fonds placés dans les paradis fiscaux à près de 6 000 milliards d’euros, avec une hausse de 12 % par an.

En plein crise de 2008, ce sont selon X Harel « près de 12 000 milliards d'euros dorment toujours dans ces territoires protégés » alors que de nombreux états sont au bord de la faillite ou en situation difficile, faute de rentrées fiscales.

Les paradis fiscaux sont donc devenus un élément essentiel de la stratégie fiscale des sociétés internationales. En 2010, la banque CIBC se félicitait d'avoir économisé plus de 820 millions de dollars canadiens en impôts grâce à ses filiales dans des paradis fiscaux.

En juillet 2012, la fondation indépendante Réseau pour la justice fiscale publie une étude sur les paradis fiscaux et sur l'évasion fiscale, chiffrée autour de 25 500 milliards d'euros, soit plus que la somme des PIB des États-Unis et du Japon

En 2013, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD-Terre Solidaire), dans son rapport intitulé « Aux paradis des impôts perdus », estime que les cinquante plus grands groupes européens sont tous présents dans les paradis fiscaux

L'existence des paradis fiscaux soulève plusieurs types de questions distinctes :

  • la concurrence fiscale

  • la concurrence économique, entre entreprises issues de pays différents

  • la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement d'organisations criminelles

  • la stabilité du système financier international

Ces questions sont néanmoins souvent évoquées ensemble (avec plus ou moins de bonne foi, dans la mesure où communiquer à propos du blanchiment d'argent est plus facile et plus porteur, que simplement se plaindre d'une perte de rentrées fiscales au profit d'un micro-état voisin)

Les paradis fiscaux sont souvent confondus avec les paradis financiers ou paradis bancaires et les paradis judiciaires.

Sur la question du blanchiment d'argent, ces pays coopèrent : beaucoup ont adopté des normes en la matière plus strictes que les pays régulés. Ces centres sont en fait massivement intégrés au système financier international, comme l'ont montré les scandales financiers Enron ou Parmalat.

Certains paradis fiscaux, au nom du secret bancaire, ne coopèrent que peu aux enquêtes des juges étrangers, faisant eux-mêmes leur contrôle de la délinquance financière et des risques bancaires et financiers. Ceci favoriserait l'opacité des circuits financiers utilisés par les sociétés qui y sont implantées, par des terroristes ou des mafieux de tous les pays du monde, par des entrepreneurs ou des hommes politiques corrompus, etc. Ces considérations conduisent certains à penser, souvent en amalgamant paradis financiers, paradis judiciaires et paradis fiscaux, que ces derniers peuvent amplifier les crises financières dans le monde (on estime qu'en 2000, plus de 50 % des flux financiers internationaux transitent par des paradis financiers).

En 1996, divers magistrats européens avaient lancé l'« appel de Genève » pour obtenir une harmonisation fiscale et judiciaire européenne, dont la levée du secret bancaire permettant de lutter contre les fraudes fiscales et le blanchiment d'argent issu de la criminalité.

Le 13 novembre 2008, répondant à une question sur les déclarations de Nicolas Sarkozy et de François Fillon appelant à « éliminer les zones d’ombre » de la finance mondiale que sont les paradis fiscaux, le juge Renaud Van Ruymbeke a dénoncé sur France Inter24 l’hypocrisie des politiques.

L'organisme intergouvern. emental Groupe d'action financière (GAFI) a établi une liste avec des critères précis

Un collectif d'ONG et d'associations, dont Attac, a lancé dans les années 2000 au niveau international une campagne destinée à lutter pour la mise en place d'un dispositif de contrôle du secret bancaire et de sanction des concurrences fiscales déloyales de certains pays aboutissant à priver d’autres de ressources qui auraient pu être affectées à des projets sociaux. La plate-forme « Paradis fiscaux et judiciaires » [archive] a ainsi rédigé une plaquette grand public montrant comment l’opacité des transferts de capitaux provenant de la corruption et les détournements de fonds publics privent les États du Sud de recettes qui auraient pu être affectées à leur développement.

Le 21 octobre 2008, dans le sillage de la crise financière internationale, l'Allemagne, la France et 15 autres pays ont mis en cause les paradis fiscaux dans la transparence du système financier international.

Voir aussi les activités de la mission parlementaire française présidée par Vincent Peillon et rapportée par Arnaud Montebourg.

Edouard Chambost, spécialiste des paradis fiscaux, estimait, en 2008, que les États-Unis s'opposent à toute idée de contrôle des paradis fiscaux à la fois parce qu'ils pensent qu'ils offrent « des services (…) peu coûteux et très souples du point de vue juridique » aux acteurs du commerce international, et parce qu'ils constituent un « aiguillon » pour maintenir des politiques fiscales faibles.

Karim Berthet, spécialiste des paradis fiscaux, considérait, en 2015, que « les États-Unis éprouvent toujours une certaine réticence à se voir appliquer pour eux-mêmes des accords de réciprocité fiscale entre juridictions fiscales étrangères. Rappelons que, jusqu’ici, cette juridiction n’a consenti à appliquer qu’une réciprocité limitée, ne communiquant à ses partenaires signataires de FATCA que des informations sur les intérêts des comptes d’épargne. Dès lors, alors que les États-Unis devraient donner l’exemple en matière de transparence fiscale en ayant imposé au monde un tel modèle FATCA, ils sont en pratique les seuls à ne pas vouloir appliquer l’échange d’informations dans son intégralité. Cela fait de FATCA un accord imposé de manière unilatérale et appliqué pour l’essentiel de manière non réciproque (il faut ici rappeler que les États-Unis protègent prioritairement leurs ressortissants, leurs entreprises et leurs banques, et qu’à ce titre, ils refusent toute application à leur encontre du BEPS, de l’EAR (échange automatique de renseignements) et de FATCA (absence totale de réciprocité)

L'OCDE établit chaque année une liste des paradis fiscaux non coopératifs. L'OCDE applique des critères assez restrictifs pour déterminer le caractère de paradis fiscal d'un pays. Elle a en quelque sorte un rôle de lanceur d’alerte fiscale.

Au premier plan, le fait que la juridiction concernée applique des impôts inexistants ou insignifiants, mais ce critère n'est pas suffisant car l'OCDE reconnaît que toute juridiction a le droit de décider d'appliquer ou non des impôts directs et, dans l'affirmative, de déterminer le taux d'imposition approprié. Les autres facteurs nécessaires pour qu'une juridiction soit considérée comme un paradis fiscal par l'OCDE sont une absence de transparence dans l'application de la loi fiscale, l'absence d'échange de renseignements à des fins fiscales avec les autres administrations, et le fait que l'absence d'activités substantielles soit admise.

Depuis que l'OCDE a mis en place des outils de lutte contre les paradis fiscaux, 33 juridictions ont pris des engagements en matière de transparence et d'échange effectif de renseignements, et ont été retirées de la liste. Les juridictions qui n'ont pas encore pris d'engagement en matière de transparence et d'échange effectif de renseignements sont : l’Andorre, le Liechtenstein et Monaco.

En mars 2009, à la suite de la pression notamment du G20, le Liechtenstein et l'Andorre ont décidé de s'aligner sur les recommandations de l'OCDE en ce qui concerne la transmission des informations financières entre pays, mais sous certaines conditions.

En coordination avec le sommet du G20, l'OCDE a publié le 2 avril 2009 une nouvelle liste de paradis fiscaux partagés en trois listes : gris clair, gris foncé et noir selon le degré d'absence de coopération. Sont répertoriés, sur une "liste noire", des États ou territoires qui ne se sont pas engagés à respecter les standards internationaux. Deux listes "grises" désignent des États ou territoires qui se sont engagés à respecter les standards internationaux mais ont à ce jour signé moins des douze accords requis. Par ailleurs, des territoires considérés comme paradis fiscaux comme JerseyGuerneseyHong Kong ou Macao ne sont plus dans la liste noire (ou grise). Ces territoires étant des dépendances du Royaume-Uni et de la Chine (Pays participants au G20).

Le 7 avril 2009, le secrétaire général de l'OCDEAngel Gurria, annonce qu'il n'y a plus aucun pays sur la liste noire des paradis fiscaux. Par conséquent, le Costa Rica, la Malaisie, les Philippines et l'Uruguay intègrent la liste "gris foncé" après avoir pris l'engagement de respecter les normes internationales en matière d'information bancaire selon l'OCDE.

Alain Deneault : les paradis fiscaux

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